Un des conseils de base que j’ai entendu le plus souvent au sujet de l’écriture est de façonner une histoire dont on connaît l’univers. Il s’agirait, autant que possible, de se rapprocher de thèmes, d’événements ou de personnages basés sur ce que l’on connaît déjà. Si j’ai vécu à Montréal toute ma vie, pourquoi j’écrirais sur Venise? Je pourrais bien faire de la recherche, ce n’est pas exclu mais, l’écriture occupant déjà une part importante de mon temps, pourquoi ne pas faire simple en écrivant une histoire se déroulant à Montréal?
Cette suggestion a du bon mais, la question que je me suis posée pendant toutes ces années où j’ai essayé d’écrire un roman c’est : qu’est-ce que je connais? De toutes les expériences faites en moins de trois décennies, laquelle constituerait un bon sujet de roman? Tout ce que j’ai vécu me semble plutôt banal et je ne voyais sur quoi je pouvais bien écrire.
La réponse m’est apparue il n’y a pas très longtemps. La vieillesse creusant sur mon visage ses sillons irréparables (hum-hum), une certaine nostalgie s’installe d’événements survenant il y a longtemps, lors de l’enfance ou de l’adolescence. C’est comme si, de communs ces souvenirs étaient jadis, ils deviennent de plus en plus précieux au fur et à mesure que le temps avance. Ce phénomène fait que les souvenirs d’une certaine époque me reviennent de plus en plus souvent, mis en relief par le sentiment d’avoir perdu quelque chose à tout jamais.
Si ça sonne proustien mon affaire, ce n’est vraiment pas volontaire. On dirait que j’ai eu une sorte d’envolée lyrique, tout à coup.
Donc, ces souvenirs qui se font plus insistants et acquièrent une valeur particulière à mes yeux à l’approche de la trentaine sont devenus la base du roman que j’écris présentement. En ce qui me concerne, je sors de l’enfance même si, légalement, je suis considérée comme une adulte depuis douze ans. Ce qui m’a formé durant l’enfance est très présent en moi. J’en rêve encore et parfois, j’aimerais y retourner pour revivre et refaire les événements.
Comme je parle un peu de mon enfance à travers un personnage, même si plusieurs inventions viennent se greffer à l’histoire, j’écris nécessairement sur des personnes réelles à travers les personnages fictifs décrits. Mes tantes y sont dépeintes en images pas tout à fait réjouissantes, comme des chipies campagnardes vieux jeu. Mes parents sont là aussi, sous une forme très diluée mais pas plaisante à observer.
Même si je ne suis pas à bout de mon processus d’écriture, il m’arrive de penser à l’effet que le portrait de mes membres de famille pourraient avoir sur ceux-ci. Encore faut-il qu’ils lisent le manuscrit ou livre publié de l’histoire. Certains sont bien vieux pour lire et mes parents eux ne lisent pas. Mais, si jamais ils le lisaient tout de même? Qu’arriverait-il? Est-ce que je subirais des remontrances pour avoir exposé une certaine image négative de ma famille? Évidemment, c’est peut-être un peu tôt pour penser à des chicanes de famille à cause de ce que j’ai écrit mais il m’arrive de penser à l’impact que cela pourrait causer et d’en avoir honte une fois le fait accompli.
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